Il avait été mis en examen pour détournement de fonds publics et violation du Code des marchés publics, dans une procédure d’acquisition de terrains et leur aménagement au profit de l’Etat. Le juge d’instruction, Leila Ayombo Mousa-Biam, a rendu cette décision le 11 février 2022. Sauf qu’elle n’a pas le même retentissement médiatique que celle relative à la mise en examen de l’intéressé quatre années plus-tôt. Elle avait été abondamment commentée dans les médias publics et sur les réseaux sociaux en janvier et en février 2018.
C’est qu’à cette époque, le pouvoir ne recherchait pas nécessairement la vérité des faits, mais il avait une volonté féroce de punir voire d’humilier certains hauts fonctionnaires mal en cour. Car l’affaire qui a conduit à une mesure de garde à vue spectaculaire d’Alain Ditona Moussavou et Juste Valère Okologo n’aurait jamais dû franchir le seuil de la porte du juge d’instruction pour ce qui est du volet CDC. La Direction générale de la contre-ingérence et de la sécurité militaire (DGCISM), plus connue sous le nom de B2, bien outillée pour ce type d’enquête, est sans doute arrivée aux mêmes conclusions que le juge d’instruction quatre ans plus tard. Deux faits majeurs étaient reprochés à Alain Ditona Moussavous, dont un détournement de fonds publics d’un montant de près 8,6 milliards de FCFA. Cet argent était la contrepartie que la CDC devait fournir au ministère des Infrastructures et de l’Aménagement du territoire, dirigé à cette époque par Magloire Ngambia, dans le cadre d’une convention signée entre les deux entités, pour permettre au ministère d’acquérir des terrains sur lesquels devaient être construits des logements sociaux, dans le cadre du programme 5000 logements d’Ali Bongo. Cette somme, à en croire les conclusions du juge, a bien été versée auprès de l’étude de Me Estelle Brahime, notaire à Libreville, courant 2014, pour l’acquisition de deux parcelles. L’une située au quartier Plaine-Orety et l’autre au quartier Pont-Nomba, à Libreville. Deux avis de versement d’Orabank du 13 novembre et 19 décembre 2014 ont ainsi pu être produits par la notaire, pour confirmer qu’elle est bien entrée en possession des sommes querellées. C’est là que s’arrête la responsabilité d’Alain Ditona Moussavou sur ce fonds.
La notaire reconnaîtra par la suite avoir mouvementé le fonds concerné sur instruction du seul ministre des Infrastructures. C’est ainsi qu’une partie de la somme a été affectée à la Société nationale des logements sociaux (SNLS) dirigée à l’époque par Paul Mapessi. Ce même compte a servi à fournir de l’argent à des particuliers toujours sur instruction du ministre, selon la notaire notamment aux sieurs Philippe Samica et Nkero Capito. À la lumière de ce fait, il devenait impossible de maintenir les accusations de détournement de fonds contre Alain Ditona Moussavou. Ce dernier ayant agi conformément à une convention. Celle-ci l’obligeait à fournir 8,6 milliards de FCFA au ministère des Infrastructures, ce qu’il a fait. La gestion par la suite de cette enveloppe ne relevait plus de sa compétence. Ce qu’a confirmé la notaire chargée de la gestion du compte concerné. Par la même occasion, Alain Ditona Moussavou ne pouvait pas non plus être accusé de violation du Code des marchés publics, vu que les contrats qui ont été attribués dans le cadre des aménagements des parcelles acquises étaient sous la seule responsabilité du ministère des Infrastructures.
La juge, qui a eu la bonne idée dès le départ de cette procédure de laisser l’ancien directeur général en liberté provisoire et sous contrôle judiciaire, vient de blanchir l’intéressé. Il faut espérer que cet homme aura suffisamment de ressorts pour oublier à jamais cette épreuve injuste que sa famille et lui-même ont dû subir depuis bientôt quatre ans.